Non, c’est non!

Mardi, j’écrivais au sujet de la demande d’injonction présentée par le chef d’Option Nationale, Jean-Martin Aussant, pour contraindre les télédiffuseurs qui organisent les débats des chefs en vue des élections du 4 septembre prochain à l’inviter à faire partie de ses débats. Le juge Jean-François Émond de la Cour supérieure du Québec a rendu sa décision, Aussant c. Société Radio-Canada, 2012 QCCS 3872. Comme je le prévoyais, il a rejeté la demande de M. Aussant.

Comme la demande vise une injonction interlocutoire, c’est-à-dire rendue avant la tenue d’un débat complet sur le fond de la question, M. Aussant doit démontrer qu’il a un droit apparent, qu’il subirait un préjudice irréparable en cas de rejet de la demande, que l’octroi de l’injonction causerait moins d’inconvénients aux télédiffuseurs que ne lui en causerait le rejet, et que la situation est urgente. L’essentiel du débat, cependant, porte sur l’apparence de droit.

Là-dessus, le premier argument de M. Aussant était fondé sur l’article 423 de la Loi électorale, en vertu duquel

[e]n période électorale, tout radiodiffuseur, télédiffuseur ou câblodistributeur ainsi que tout propriétaire de journal, périodique ou autre imprimé peut mettre gratuitement à la disposition des chefs des partis et candidats du temps d’émission à la radio ou à la télévision ou de l’espace dans le journal, le périodique ou autre imprimé, pourvu qu’il offre un tel service de façon équitable, qualitativement et quantitativement, à tous les candidats d’une même circonscription ou à tous les chefs des partis représentés à l’Assemblée nationale ou qui ont recueilli au moins 3% des votes valides lors des dernières élections générales.

Le juge Émond note que cet argument avait déjà été rejeté par la Cour d’appel (ainsi que par la Cour supérieure). Il rejette les prétentions de M. Aussant, selon qui cette décision “ne tient pas la route” (par. 33). L’historique législatif de la Loi électorale, que M. Aussant avait invoqué au soutien de ses prétentions, ne les appuie pas. (Le juge Émond ne cite pas les commentaires ministériels en cause.)

Le deuxième argument de M. Aussant était fondé sur la liberté d’expression. Comme l’observe le juge Émond, cet argument, lui-aussi, a déjà été considéré par les tribunaux, qui l’ont rejeté, le plus récemment dans  May v. CBC/Radio-Canada, 2011 FCA 130, au par. 25 (citant Trieger v. Canadian Broadcasting Corp., (1988), 54 D.L.R. (4th) 143 (ONSC)).

Le dernier argument de M. Aussant était que les télédiffuseurs ne l’avaient pas invité en raison de ses prises de positions, et que, ce faisant, ils ont violé sa liberté d’opinion. Le juge Émond considère que cette prétentions est sans fondement. Il n’existe aucune preuve de ce que l’exclusion de M. Aussant aurait été motivée par ses opinions. De plus, il n’est même pas clair que la Charte des droits et libertés de la personne s’applique aux télédiffuseurs, régis par le droit fédéral. C’est un bon point, qui m’avait échappé lorsque j’avais considéré le fond de la question ici. Peccavi. (La réponse dépendrait de l’application des règles sur les immunités inter-juridictionnelles, que j’ai récemment décrites ici.) Par ailleurs, il s’appliquerait avec autant de force au droit à la liberté d’expression.

Bref, le moins qu’on puisse dire, conclut le juge Émond, c’est que le droit de M. Aussant de contraindre les télédiffuseurs à l’inviter aux débats des chefs n’est pas apparent. Cela suffit pour conclure au rejet de sa demande d’injonction interlocutoire. De plus, le juge souligne que la prépondérance des inconvénients ne favorise pas M. Aussant, puisque l’octroi de l’injonction qu’il recherche, à quelques jours des débats, pourrait causer des problèmes majeurs aux télédiffuseurs.

En principe, un jugement sur une requête en injonction interlocutoire ne dispose pas du fond du litige. M. Aussant est libre de poursuivre sa demande. Certes, le débat aura eu lieu sans lui, et les télédiffuseurs pourraient soutenir que la demande est donc devenue purement théorique. Cependant, les tribunaux pourraient exercer leur pouvoir discrétionnaire de l’entendre quand même, puisque la question est importante et qu’elle risque de se poser de nouveau lors de prochaines élections. Il s’agit de savoir si M. Aussant a envie de poursuivre le débat, vu le rejet sans équivoque de ses arguments quant au fond de la question.

L’important, c’est de participer?

Il y a un mois, j’ai publié un billet sur la possibilité qu’un candidat déçu de ne pas recevoir d’invitation à un débat des chefs se tourne vers les tribunaux pour tenter d’obtenir le droit d’y prendre part. Depuis, le blogue a régulièrement eu des visites de la part de gens qui ont utilisé les termes de recherche tels qu’ “injonction débat des chefs”. Si souvent, en fait, que je me demandais si quelque chose se tramait. Eh bien, la réponse est oui, même si je n’ai aucun moyen de vérifier s’il y a vraiment un lien entre toutes ces visites et la campagne de Jean-Martin Aussant qui, comme le rapporte Radio-Canada, demande une injonction pour obtenir le droit de participer aux débats des chefs prévus la semaine prochaine. La demande en injonction d’urgence doit être entendue demain.

Je suis à peu près certain qu’elle sera rejetée. Comme je l’écrivais le mois dernier,

[L]es tribuaux sont réticents à octroyer de telles injonctions. Ils ne le font que dans les cas où la personne qui demande l’injonction démontre qu’elle y a un droit plutôt clair. Si le cas est douteux, l’injonction sera refusée. C’est ce qui se produit avec les débats des chefs. Les demandes d’injonction sont faites en catastrophe, une fois la campagne électorale déclenchée et la formule du débat annoncée. Or, le droit d’un chef qu’on n’y a pas invité d’y participer n’est pas clairement établi.

Il faudrait répondre à plusieurs questions difficiles pour l’établir, même dans le cadre d’un débat sur le fond, qui ne peut pas avoir lieu dans le cadre d’une demande d’injonction d’urgence:

 il faudra trouver un équilibre entre les droits de plusieurs parties impliquées : celui des réseaux de télévision à la liberté d’expression, qui inclut logiquement un droit de choisir le contenu de leur programmation, celui des partis invités de débattre contre qui ils veulent bien (et donc de ne pas débattre contre certains de leurs adversaires), celui des partis exclus de participer au processus électoral, celui peut-être des électeurs à être bien informés… Bref, il s’agirait bel et bien d’un débat complexe et dont l’issue serait pour le moins incertaine. En fait, j’aurais tendance à dire que les tribunaux rejetteront probablement la demande d’un chef de parti exclu, ne serait-ce que parce que l’accepter exigerait aussi de formuler des critères pré-déterminés selon lesquels les invitations devraient être faites. Les tribunaux, selon moi, ne seraient pas capables de le faire, et ne devraient même pas essayer.

Peut-être conscient de ces difficultés, M. Aussant invoque un autre argument, fondé sur “l’esprit de la Loi électorale et de son article 423.” Cet article dispose qu’

[e]n période électorale, tout radiodiffuseur, télédiffuseur ou câblodistributeur ainsi que tout propriétaire de journal, périodique ou autre imprimé peut mettre gratuitement à la disposition des chefs des partis et candidats du temps d’émission à la radio ou à la télévision ou de l’espace dans le journal, le périodique ou autre imprimé, pourvu qu’il offre un tel service de façon équitable, qualitativement et quantitativement, à tous les candidats d’une même circonscription ou à tous les chefs des partis représentés à l’Assemblée nationale ou qui ont recueilli au moins 3% des votes valides lors des dernières élections générales

 Or, bien que je ne l’aie pas discuté dans mon billet précédent, ce même argument a déjà été invoqué dans le même contexte par l’Action Démocratique du Québec, qui essayait d’obtenir pour son chef, Mario Dumont, une participation au débat des chefs en vue de l’élection de 1994. Dans Action Démocratique du Québec c. Parti Libéral du Québec, 1994 CanLII 5919 (QC CA), L’éminent juge Jean-Louis Beaudouin a statué que

 [l]’article 423 lu dans son contexte législatif permet, en effet, à un télédiffuseur de mettre gratuitement à la disposition de partis politiques et de candidats un temps d’antenne pour leur permettre de faire leur propre publicité.  Il s’agit donc d’encourager la diffusion de véritables messages publicitaires conçus, préparés et délivrés par le ou les représentants de chaque parti politique, comme bon leur semble.  Il ne s’applique manifestement pas dans l’hypothèse d’une émission d’affaires publiques où le débat n’est pas laissé à l’initiative des partis ou de leur chef politique, mais imaginé, élaboré et organisé par le diffuseur, selon un scénario précis où chaque participant est tenu de répondre à des questions formulées par les journalistes et où l’initiative est prise par ceux-ci et non laissé à ceux qui se prêtent à cet exercice médiatique.

[L]e droit invoqué n’est pas apparent et, en toute déférence pour l’opinion contraire, ne m’apparaît même pas pouvoir être sérieusement appuyé sur le texte précité.

Il ne suffit pas de torturer un texte pour le faire parler!!!!

(Le soulignement et tous les points d’exclamation sont du juge Beaudouin.)

C’est là non seulement un précédent qui lie le juge de Cour supérieure qui entendra la demande de M. Aussant, mais aussi la décision logique. On a l’impression que pour M. Aussant, en litige comme en politique, l’important, ce n’est pas de gagner, mais de participer.

Oui… Non… Peut-Être?

La question de l’application de règles de la Loi électorale québécoise concernant les dépenses électorales des citoyens à des activités sur internet, que j’ai déjà abordée ici et ici, refait encore surface. Selon un article de Radio-Canada, le Directeur général des élections a d’abord conclu que liberaux.net, un site farouchement opposé au Parti libéral du Québec, controvenait à la Loi électorale, qui limite sévèrement les dépenses que toute personne autre qu’un parti politique ou un candidat peut encourir en période électorale pour favoriser ou défavoriser l’élection d’un parti ou d’un candidat; moins de 24 heures plus tard, le DGE a changé d’idée.

Selon Radio-Canada, le DGE a conclu que liberaux.net était un « média citoyen [similaire] à l’un de ceux qui bénéficient de l’exception prévue à l’article 404 de la Loi électorale premier paragraphe, lequel garantit la liberté d’expression des médias en spécifiant qu’il ne s’agit pas d’une dépense électorale ». La créatrice du site insiste, elle aussi, sur le fait qu’elle est une simple citoyenne. Elle n’aurait, en fait, rien dépensé pour créer le site, sauf son travail bien sûr, et l’hébergement du site lui aurait été offert gratuitement.

Selon moi, le DGE a tort dans son interprétation de la Loi électorale. Il l’interprète pour lui faire dire ce qu’elle devrait peut-être dire, mais qu’elle ne dit pas. La disposition pertinente, le paragraphe 1 de l’article 404, exclut de la définition de « dépenses électorales »

la publication, dans un journal ou autre périodique, d’articles, d’éditoriaux, de nouvelles, d’entrevues, de chroniques ou de lettres de lecteurs, à la condition que cette publication soit faite sans paiement, récompense ou promesse de paiement ou de récompense, qu’il ne s’agisse pas d’un journal ou autre périodique institué aux fins ou en vue de l’élection et que la distribution et la fréquence de publication n’en soient pas établies autrement qu’en dehors de la période électorale.

Le texte anglais de cette disposition parle de

the cost of publishing articles, editorials, news, interviews, columns or letters to the editor in a newspaper, periodical or other publication, provided that they are published without payment, reward or promise of payment or reward, that the newspaper, periodical or other publication is not established for the purposes or in view of the election and that the circulation and frequency of publication are as what obtains outside the election period.

Le problème de liberaux.net, c’est qu’il ne s’agit pas d’ « un journal ou autre périodique ». Un périodique, selon le Dictionnaire de l’académie française, est une publication « qui paraît par livraisons successives, dans des temps fixes et réglés ». La référence, dans la Loi, à la fréquence de publication du « journal ou autre périodique » confirme que le législateur avait ce sens à l’esprit. Un quotidien, un hebdomadaire, une revue qui paraît dix fois l’an, ce sont des périodiques au sens de la Loi électorale. Un site web qui est mis à jour au gré de la motivation et des envies de son auteur n’en est pas un.

On pourrait être tenté de se rabattre sur le texte anglais, en apparence plus permissif, puisqu’il parle de « newspaper, periodical or other publication » (mes italiques). Mais même en mettant de côté la définition de “publication” de l’Oxford English Dictionary comme « a book or journal issued for public sale », à laquelle un site web ne correspond absolument pas, je pense que c’est bien le texte français qui reflète l’intention du législateur, vu la référence – dans les deux langues officielles – à la fréquence de la publication.

De plus, l’interprétation « technologiquement neutre » du DGE va à l’encontre de l’économie de l’article 404 de la Loi électorale qui contient des dispositions séparées, aux paragaphes 1, 2 et 3, s’appliquant respectivement à la presse périodique, aux livres et aux médias de télécommunication (radio et télévision). Selon moi, cette interprétation est donc erronée.

Il est sans doute regrettable – je dirais même ridicule – que la Loi électorale n’accomode aucunement l’expression des citoyens sur internet. En comparaison, la Loi électorale du Canada exempte de sa définition de « publicité électorale », à l’alinéa 319(d), « la diffusion par un individu, sur une base non commerciale, de ses opinions politiques sur le réseau communément appelé Internet ». On pourrait bien sûr se demander si cette exemption est suffisante. (Pourquoi s’applique-t-elle à des inidvidus, mais pas à des groupes, par exemple?) On pourrait aussi se demander une disposition « technologiquement neutre », s’appliquant à toute forme d’expression citoyenne, ne serait pas préférable à des dispositions particulières à chaque média. Quoi qu’il en soit, la disposition fédérale, c’est mieux que rien.

Or, la loi québécoise n’en contient pas d’équivalent. Il n’appartient pas au DGE, qui doit faire appliquer la loi, de la réécrire, si souhaitable cette réécriture soit-elle.

The Moneyed Interests

Restrictions on pre-electoral spending by citizens and groups other than political parties and their candidates (known in the jargon as “third-party spending”) have gained a rather unlikely supporter: Tom Flanagan. Prof. Flanagan, arguably Canada’s most prominent conservative thinker, has come out in support of such restrictions in an op-ed in the Globe and Mail.

This might seem surprising because conservatives (and libertarians) have usually opposed restrictions on third-party spending, while the left supported them. (Indeed, prof. Flanagan says he opposed the enactment of third-party spending restrictions while Jean Chrétien was Prime Minister.) The support for restrictions was always based on the fear of the pernicious influence of moneyed interests in politics. John Rawls, for example, argued that without spending restrictions, the rich would take over the political process and prevent the enactment of the sort of re-distributive policies he thought were necessary for society to be just. But the reality, as it turns out, is more complicated, which explains prof. Flanagan’s change of heart.

Prof. Flanagan points out that during the last election campaign in Ontario, public-sector trade unions spent large amounts of money on electoral advertising: “[t]ogether, the three spent more on advertising in the writ period than either of the main parties.” Furthermore, this spending all pursued a single objective – to attack the Progressive Conservative Party. Prof. Flanagan argues that it thus effectively amounted to support for the Liberals. The unions would not have been able simply to give that much money to the Liberals, but the absence of limits on third-party spending allowed them to circumvent the limits on direct contributions to political parties.

Prof. Flanagan thinks this has terrible consequences, though if your politics differ from his, you are likely to disagree. What should not be controversial is that third-party spending limits – or their absence – do not necessarily have the effects Rawls and other supporters of these limits on the left expected them to have. It is not only the rich who have a lot of money. It is also the not-so-rich who are able to pool their resources together, through trade-unions for example, or student unions (which are bound to run into the strictures of Québec’s spending restrictions when an election is called, as I have been saying for months). They too are the moneyed interests whom third-party spending limits prevent from getting their message across as effectively as they would like. Both on the left and on the right, those whose opinion of spending limits is based on the conventional wisdom that they prevent the “rich” from gaining a stranglehold on the political process and thus help the “powerless” need to reconsider their views.

Ne parlez pas en bien, ne parlez pas en mal

Radio-Canada a mis en ligne une entrevue avec Denis Dion, un porte-parole du Directeur général des élections du Québec, portant, pour l’essentiel, sur l’application éventuelle de la Loi électorale, et notamment de ses règles concernant les « tiers »,  aux médias sociaux, vu l’importance du rôle qu’ils pourraient jouer dans la prochaine campagne électorale. C’est un sujet qui attire beaucoup d’attention dernièrement. D’ailleurs, je l’avais évoqué ici il y a quelques semaines.

M. Dion soutient que « [l]a Loi électorale n’a certainement pas pour but de limiter les débats dans la société québécoise durant les 33 jours de la période électorale ». Ce n’est pourtant manifestement pas vrai. En imposant des limites sévères aux dépenses des partis et des candidats, et en interdisant presque toute dépenses par quelque autre personne, la Loi électorale a pour effet de limiter les débats, et cet effet est tellement fort et prévisible qu’il est difficile de prétendre que telle n’était l’intention du législateur lorsqu’il adoptait la loi. En fait, M. Dion en est conscient. Comme il dit lui-même, la Loi électorale « exclut la participation des personnes qui viendraient à côté des … partis pour faire des dépenses ce qui désiquilibrerait ce que la loi veut équilibrer » – c’est-à-dire les ressources des différents partis politiques, qui sont, comme je le soulignais ici, les acteurs centraux, dominants, du système électoral. (D’où le choix révélateur de la préposition « à côté » par M. Dion.) On pourrait envisager plusieurs façons – certaines plus pratiques que d’autres ― d’atteindre cet équilibre. La Loi électorale représente un choix clair en faveur d’un système qui préserve cet équilibre en baillonant tous ceux qui risqueraient de le rompre.

Pour ce qui est de l’application de la Loi électorale aux médias sociaux, M. Dion confirme ce que j’écrivais il y a deux semaines et demie: la communication d’un message électoraliste par les médias sociaux n’est pas une dépense électorale au sens de la loi, puisqu’elle ne coûte rien à son auteur. Par ailleurs, il rappelle aussi qu’un message ne sera pas couvert par la loi s’il ne tend pas à favoriser ou à défavoriser l’élection d’un parti ou d’un candidat en particulier. Ainsi, dit M. Dion, « votez contre ceux qui soutiennent la hausse des frais de scolarité » est un message partisan qui sera couvert par la loi si son auteur paie pour le diffuser, alors que « votez pour l’accès à l’éducation » ne l’est peut-être pas. Finalement, rappelle M. Dion, on peut aussi échapper à l’effet de la Loi électorale « [s]i de par votre notoriété il y a toujours un journaliste qui vous court après » et que tout ce que vous dites se retrouve dans les médias, sans que vous n’ayez à payer. Un rappel, probablement pas intentionnel, du fait que la Loi électorale favorise les groupes bien établis au détriment des nouveaux-venus, dont les journalistes ne font pas la promotion gratuite.

Les médias sociaux auront-ils un effet important sur la prochaine campagne électorale? Difficile de le dire pour l’instant. Cependant, c’est une possibilité. Si ça s’avère éventuellement être le cas, dit M. Dion, « peut-être faudra-t-il adapter nos lois étant donné l’évolution de la façon dont les messages sont diffusés ». J’aurais bien aimé qu’on lui demande dans quel sens cette modification pourait aller. Comme je l’écrivais ici, on pourrait conclure que, puisque les médias sociaux permettent à quiconque de diffuser des messages électoralistes de façon plus ou moins illimittée, les limites imposées à la diffusion de tels messages par les moyens traditionnels ne sont plus utiles. Cependant, on pourrait aussi conclure que la seule façon de garder les partis politiques au centre du débat pré-électoral, c’est de commencer à censurer la diffusion de messages électoralistes sur les médias sociaux. M. Dion et son patron ont-ils les ressources et la volonté pour le  faire?

Plus on est de monde…

Il y aura, dit-on, bientôt des élections au Québec. Et qui dit élections, dit débat des chefs. Et qui dit débat des chefs, dit controverse sur la question de qui inviter et qui laisser de côté. Gilbert Lavoie pose la question en vue de la prochaine campagne électorale dans un billet sur son blogue pour La Presse. Il y a deux groupes parlementaires reconnus à l’Assemblée nationale, mais trois autres partis y ont également des députés. Alors, se demande M. Lavoie, « [a]urons-nous un débat à deux, à trois, à quatre ou à cinq? »

Et puis il y en a plusieurs autres qui vont présenter des candidats aux élections (il y a une vingtaine de partis enregistrés au Québec, mais tous ne sont pas actifs). Ils n’auront peut-être pas grande chance de les faire élire, mais ils voudraient bien, eux aussi, profiter de la tribune qu’est le débat. Tout comme les chefs des partis établis, qui voudront en tirer le maximum de visibilité en écartant le plus grand nombre d’adversaires possible du débat télévisé (et réduire, du même coup, le nombre d’attaques qu’ils doivent affronter et la visibilité de leurs adversaires).

Vu ces intérêts contradictoires et l’importance de l’enjeu, il est possible que certains partis exclus des débats se tournent vers les tribunaux pour obtenir d’y être invités, comme c’est déjà arrivé par le passé au Québec, lors d’élections fédérales, et dans d’autres provinces. Cependant, jusqu’à présent, les tribunaux ont toujours refusé de contraindre les réseaux de télévision, qui organisent les débats des chefs, d’y inviter un chef de parti. Cependant, aucune de ces décisions n’a été prise après un débat complet sur le fond de la question. Elles ont été rendues généralement dans le cadre de demandes d’injonctions d’urgence.

Le problème, c’est que les tribunaux sont réticents à octroyer de telles injonctions. Ils ne le font que dans les cas où la personne qui demande l’injonction démontre qu’elle y a un droit plutôt clair. Si le cas est douteux, l’injonction sera refusée. C’est ce qui se produit avec les débats des chefs. Les demandes d’injonction sont faites en catastrophe, une fois la campagne électorale déclenchée et la formule du débat annoncée. Or, le droit d’un chef qu’on n’y a pas invité d’y participer n’est pas clairement établi. Pour l’établir, il faudrait une preuve et un débat complets, ce que les tribunaux ont d’ailleurs souligné à quelques reprises (par exemple dans une décision ontarienne citée dans May v. CBC/Radio-Canada, 2011 FCA 130, au par. 25). Et une fois la demande d’injonction urgente rejetée, le demandeur perd généralement son intérêt pour la cause, et le débat sur le fond n’a jamais lieu. C’est ce qui semble être arrivé avec Mario Dumont, qui avait contesté son exclusion du débat des chefs en 1994, et c’est ce qui est arrivé avec Elizabeth May l’an dernier.

Si jamais le débat sur le fond finit par avoir lieu, il va impliquer plusieurs questions difficiles. Au niveau fédéral et dans les provinces autres que le Québec, le premier obstacle que doit surmonter un chef qui prétend avoir un droit constitutionnel est de devoir démontrer que la Charte canadienne des droits et libertés s’applique à la question. Ce pourrait être le cas si la décision d’inviter ou d’exclure un chef est attribuée au CRTC  ou si les réseaux de télévision qui organisent le débat agissent en vertu d’une délégation d’un pouvoir réglementaire par le CRTC ou exercent autrement un rôle essentiellement public. Au Québec, cette question se résout facilement, puisque la Charte des droits et libertés de la personne s’applique aux personnes privées.

Même si l’une ou l’autre Charte s’applique, il faudra trouver un équilibre entre les droits de plusieurs parties impliquées : celui des réseaux de télévision à la liberté d’expression, qui inclut logiquement un droit de choisir le contenu de leur programmation, celui des partis invités de débattre contre qui ils veulent bien (et donc de ne pas débattre contre certains de leurs adversaires), celui des partis exclus de participer au processus électoral, celui peut-être des électeurs à être bien informés… Bref, il s’agirait bel et bien d’un débat complexe et dont l’issue serait pour le moins incertaine.

En fait, j’aurais tendance à dire que les tribunaux rejetteront probablement la demande d’un chef de parti exclu, ne serait-ce que parce que l’accepter exigerait aussi de formuler des critères prédéterminés selon lesquels les invitations devraient être faites. Les tribunaux, selon moi, ne seraient pas capables de le faire, et ne devraient même pas essayer. Ils pourraient peut-être exiger que les législatures le fassent, mais je me demande si même elles en seraient capables, sans parler du fait que la législation à ce sujet servirait (comme toute législation électorale) les intérêts des partis déjà établis et présents dans la législature.

The Separation of Spending and Speech

I commented yesterday onVincent Marissal’s column in La Presse about the impact of social media on the upcoming election campaign in Québec – and the way in which the social media undermine the regulation of the electoral process that limits the electoral expenses of “third parties” – citizens, groups, or organizations that are neither political parties nor candidates for office. I want to return to this topic, focusing now on its theoretical, rather than its practical, implications.

The current schemes for the regulation of electoral campaigns in Canada are premised on the idea that one must, generally, spend in order to speak – or at least, in order to make one’s speech heard by any significant number of people. So long as this premise holds, a limit on electoral spending is a limit on electoral speech. And, subject to a few exceptions (such as the publication of letters to the editor or op-eds in newspapers, at the newspapers’ expense), which were also exempt from the electoral regulations, that premise did in fact hold true until the advent of social media.

It no longer does. A tweet might be read by thousands, even hundreds of thousands of people. A YouTube video can be seen by millions. And their authors will not have to pay a dime for the dissemination of their messages. Spending and speech have come apart – and a key assumption underlying the regulation of elections in Canada no longer holds true. So what becomes of our current regulatory schemes? Should we discard them as obsolete? And if so, what should we replace them with?

The answer to these questions depends on the purpose for which we regulate electoral campaigns. The trouble is that our current regulations have not one, but two purposes On the one hand, as I noted in an op-ed Cyberpresse published in April, our electoral regulations aim to suppress the influence of money on the electoral process, which they assume to be unfair and/or pernicious. On the other, they aim, as I suggested in a recent post, to put political parties at the centre of the electoral process, by consigning “third parties” to the margins. These two purposes worked together so long as spend-to-speak model of electoral communications held, because limiting electoral expenses by third parties served both. But now it no longer does. It still works to reduce the influence of money, but limiting or prohibiting electoral expenditures by third parties no longer prevents them from speaking, loudly and to very large audiences, though social media. That is a central point of Mr. Marissal’s column – political parties can no longer be sure of controlling the electoral debate, and outsiders can easily play an important role in it.

So if our main concern is with the role of money, we can keep our electoral regulations as they are. Indeed, they are arguably less troubling now than they once were, since they do not actually prevent people from speaking out on political issues. In effect, they only direct that third parties must, during election campaigns, speak through social media. Only, I wonder if such a rule has any point. It is not money, after all, that our current regulations try to subdue, but the people who have a lot of it, individually or collectively. And if these people are able to speak anyway, through social media, what do we care to prevent them from spending their money on something they can get for free? If, however, our concern is to maintain the party- and candidates-centred model of elections, the current regulations are obsolete and utterly inadequate to the task. New rules are required – as well as the will and the means to police their application to the internet’s wilderness. I doubt that our governments have either.

Une campagne 1.9

Vincent Marissal a publié une chronique intéressante dans La Presse ce matin, sur “la première vraie campagne 2.0” que le Québec vivra lorsque les élections seront déclenchées – vraisemblablement dans les prochains mois. Contrairement aux États-Unis, où internet et, surtout, les réseaux sociaux ont transformé les campagnes électorales dès 2004, et certainement en 2008, le changement a tardé à se faire sentir au Québec. M. Marissal relève une autre différence: alors qu’aux États-Unis ce sont les candidats (notamment Barack Obama) qui ont donné aux nouveaux médias un rôle central dans les campagnes électorales, “la révolution 2.0 au Québec viendra probablement des électeurs plus que des partis politiques.” Comme toute révolution digne de ce nom, celle-ci va heurter les habitudes et les normes établies, non seulement sur le plan politique, qui n’est pas de mon ressort ici, mais aussi sur le plan juridique. Je me concentre, dans ce billet, sur les aspects pratiques des changements qu’elle amène, gardant une réflexion théorique pour un autre, bientôt.

Comme le souligne M. Marissal, la Loi électorale québécoise essaie de circonscrire les interventions dans une campagne électorale aux partis politiques. Les dépenses des “tierces parties” – c’est-à-dire tout le monde sauf les partis politiques enregistrés et les candidats – sont très sévèrement limitées. Or, dit-il,

Twitter, Facebook et surtout YouTube permettent ce que la loi électorale québécoise interdit: des interventions de tierces parties, non officiellement associées à un parti politique, anonymes le plus souvent et dont les interventions ne sont pas comptabilisées dans les dépenses électorales. …  [P]lusieurs groupes, en particulier du côté des artistes, sont très mobilisés contre le gouvernement Charest et … ils ne se gêneront pas pour intervenir lors de la prochaine campagne électorale sur les réseaux sociaux. En fait, c’est déjà commencé. … Encore là, toutefois, l’univers 2.0 appartient à tout le monde, et rien n’empêche des groupes favorables aux libéraux (ou opposés au PQ, à la CAQ ou à Québec solidaire) de jouer aussi cette carte [ce que certains font déjà].

Cependant, les choses ne sont pas si simples. La Loi électorale s’applique, en principe, aux interventions sur les médias sociaux. À cet égard, comme en d’autres matières, elle est plus restrictive que la Loi électorale du Canada, ainsi que la législation équivalente de certaines autres provinces. L’article 319 de la loi fédérale, par exemple, exclut de sa définition de la “publicité électorale” qu’elle réglemente et limite “la diffusion par un individu, sur une base non commerciale, de ses opinions politiques sur le réseau communément appelé Internet.” La loi québécoise ne contient pas d’équivalent de cette exemption (elle-même plutôt étroite puisqu’elle n’applique pas, notamment, à l’expression pré-électorale de groupes).

Par contre, elle ne contrôle que les “dépenses électorales”, c’est à dire “le coût de tout bien ou service utilisé pendant la période électorale” pour aider un candidat ou un parti ou leur nuire (art. 404). En supposant qu’il s’agit du “coût” à la personne qui communique un message, la communication d’un message électoraliste sur les médias sociaux n’est pas couverte par cette définition, puisqu’elle est gratuite. Cependant, peu importe le moyen de communication choisi, la production d’un message électoraliste sera couverte par la définition de la Loi électorale si elle entraîne des dépenses.

Donc si vous tapez une missive anti-PLQ chez vous et la diffusez sur Facebook, vous ne contrevenez pas à la loi, puisque vous ne dépensez que votre temps. Mais si vous tournez une vidéo dénigrant ce même PLQ, dont la production et le montage en coûtent quelques centaines de dollars, et que vous la diffusez sur ce même Facebook ou sur YouTube, vous avez engagé une dépense électorale – ce que la loi vous interdit de faire.

Bref, M. Marissal a raison de dire que les médias sociaux changent ou, du moins, permettent de contourner, les règles du jeu établies avant leur apparition. Mais ils ne permettent pas de s’en affranchir tout à fait. Comme après la plupart des révolutions, l’ancien droit est tenace. On n’aura pas peut-être pas une campagne tout à fait 2.0 – mais au moins, 1.9.

Who Plays on a Level Field?

Any regulation of the democratic process reflects a certain normative view of an idealized democracy. For example the decision of the Supreme Court of the United States in Citizens United v. Federal Elections Commission, 558 U.S. 50 (2010), to allow corporate and union spending on electoral campaigns reflects a (stated) view that democracy functions best when the quantity of political speech speech is maximized, and is impaired if any category of speakers is silenced. Canadian electoral legislation and the leading cases in this area decided by the Supreme Court of Canada, Libman v. Québec (A.G.), [1997] 3 S.C.R. 569, and Harper v. Canada (A.G.), 2004 SCC 33, [2004] 1 S.C.R. 827, reflect a different normative view, which Colin Feasby, the most prolific writer on the law of democracy in Canada, has called an “egalitarian model” of elections. But such ideals leave much unsaid. The Supreme Court of the United States says that it maximizes freedom and the amount of information available to voters, but pays little attention, for example, to the likely detrimental effects the need to raise funds for an unlimited-expenses campaign has on the performance of elected officials (and candidates for office).

What does the Canadian “egalitarian model” leave unsaid? A metaphor that the Supreme Court uses in Harper, that of “a level playing field for those who wish to engage in the electoral discourse” (par. 62) is helpful to try to understand. The Supreme Court probably invoked it for no reason beyond its feel-good appeal to our sense of fair play (though the appeal is lost on some, including the Chief Justice of the Supreme Court of the United States, John Roberts, who, in Arizona Free Enterprise Club v. Bennett, (2011) 131 S. Ct. 2806, at 2826, Chief Justice Roberts has observed that although “‘[l]eveling the playing field’ can sound like a good thing … in a democracy, campaigning for office is not a game.” But I would like to extend the metaphor a little, and explore the implications of describing electoral debate as a football game (or a chivalry tournament – or, perhaps less romantically, a duel – for those who read the French version of the judgment, which speaks of debate “à armes égales”; the imagery is somewhat different, but still amenable to the interpretation I am about to suggest) because it reveals more than the Court probably intended about the roles of those involved in the political process under the egalitarian model.

If the electoral process as envisioned by the Supreme Court is a football game played on an “even playing field,” political parties are of course the teams playing on that field. According to the adherents of the egalitarian conception of democracy, they are the primary competitors for the prize of political power. Political parties are like professional sports teams, with coaching and scouting staff of consultants and opposition researchers, their farm clubs of youth organizations, their practice rosters of backbenchers and, of course, their fans among the voters. These fans, along with less interested spectators, are seating in the stands around the playing field. A few of them might unfurl some home-made banners to make their opinion of the proceedings or the competitors known, but for the most part they will, at most, cheer their favourites and boo the opponents. There are even cheerleaders around the field, although they wear suits, as befits members of editorial boards. Neither players nor spectators, they try to stir up the enthusiasm of the latter for the former.

This extended metaphor highlights some salient features of the egalitarian model of elections implemented by Parliament in the Canada Elections Act, and endorsed by the Supreme Court, such as the special status of the media and, most importantly, the central role of political parties in electoral discourse and the relative passivity of the voters. The metaphor only breaks down on Election Day, when the voters are at last allowed to leave the stands, and to choose the winner of the game they have (or have not) been watching.

I think this is a rather less rosy picture than that which the Supreme Court would like us to see. Metaphors, even old and stale ones, are dangerous that way.

More about Election Law

There are two things to mention today, both related to election law, and more specifically to restrictions on “third-party” speech in the pre-electoral context.

First, Radio-Canada reports that Québec’s Chief Electoral Officer has been in touch with the leaders of the student organizations who are protesting the tuition fee hikes announced by the provincial government. The protesters are angry at Premier Jean Charest and the Québec Liberal Party and have made no secret of their desire to help defeat them when the next election is called – there was speculation that it might happen this spring, but the fall now seems more likely. Well, as I have argued in an op-ed that Cyberpresse published in mid-April, the expenses the protesters will incur during an eventual election campaign will be covered – and severely limited, indeed almost to the point of being prohibited – by the draconian third-party spending provisions of Québec’s Election Act. Radio-Canada quotes the Chief Electoral Officer’s spokesperson as saying that the “objective was not to prevent [the protesters] from expressing themselves. The goal was to make sure that they comply with the law.” The trouble is, the effect of the law will be to prevent the protesters from expressing their views. As I said here already, Québec’s law was intended to prevent the rich from capturing the democratic process, but operates to silence not only the rich, but also those who are not well-off, while shielding the incumbent politicians from criticism by political outsiders.

And second, NYU’s Richard A. Epstein has an interesting (albeit asininely entitled) essay responding to Jeffrey Toobin’s story of the U.S. Supreme Court’s Citizens United decision. As before,  I will avoid discussing the merits of the Citizens United decision itself (though I find prof. Epstein’s essay well-argued, as I did a lecture he gave at NYU in September 2010; at least, a good criticism of Citizens United would need to address the points prof. Epstein makes). I want to mention, however, that prof. Epstein is skeptical of the distinction that Mr. Toobin sought to make between “electioneering” by means of TV advertisements and books. He writes that

Toobin … fights against modern technology when he seeks to draw a hard and fast line between “the pervasive influence of television advertising on electoral politics” and books that operate “in a completely different way,” given that individuals have to make an “affirmative choice to acquire and read a book.”

Oh? Thanks to the internet, books can be excerpted and transmitted in a thousand different ways online to consumers who need only a single click to ignore messages they don’t like. Given the vast reduction in cost in the production of information, it seems positively odd to ban, or even regulate, one form of dissemination while allowing other forms to survive unregulated.

His conclusion, of course, is not that we should censor books, but that we should not restrict other forms of “electioneering” either. That’s pretty much what I argued in my previous post on this topic. The distinction between books and TV ads is not obvious, and indeed probably not tenable. Canadian election legislation makes it, exempting (some) books from its application, but it is not a principled distinction. The principle underlying our law would in fact allow censorship of books (indeed it already allows censorship of some books, as I explained), and that suggests that this principle is misguided.

UPDATE: The Globe also has a story about the Chief Electoral Officer’s warning to student organizations. It emphasizes limits on individual contributions to electoral campaigns, but I think this emphasis is misplaced. The real problem is not with contribution limits, but with those on third-party spending.